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John Cassavetes est peut-être considéré comme le père du cinéma indépendant américain, mais les années 80 ont vu une bande de jeunes accepter son héritage. À eux tous, Steven Soderbergh, Spike Lee, les Coen, Jim Jarmusch et John Sayles ont changé le cinéma – ou du moins offert une alternative aux Simpson et Bruckheimer. Mais le temps passe, les gens s’assagissent et les rabatteurs deviennent l’establishment.

Il est donc intéressant de constater que l’icône indie Richard Linklater – le type qui est devenu la voix cinématographique de la génération X avec Slacker – a réalisé un film grand public. D’autant plus qu’il arrive quelques mois après que les Coen ont sorti Intolerable Cruelty, leur film le plus conventionnel à ce jour, et un an après que Spike Lee s’est également rapproché de l’establishment avec 25th Hour. Pourtant, ceux qui prétendent que Linklater s’est vendu ne voient pas l’essentiel : School est peut-être une formule, calculée et aussi prévisible qu’un album d’Iron Maiden, mais il n’y a aucun doute sur la passion débridée de Linklater pour son sujet.

Pas l’enseignement des fournitures, stupide. Le rock. Du bon gros rock qui transpire, qui crie et qui couine. Et pas de ce genre de Darkness si ironique, non plus. On parle des Doors, d’Hendrix, d’AC/DC… Tous ces groupes que Linklater a adorés dans son enfance et qu’il a rapidement mis sur la bande originale de son deuxième film, Dazed And Confused. Plus celui dont il a essayé d’obtenir les droits sans y parvenir, Led Zeppelin, qui lui a accordé l’utilisation de `Immigrant Song’. (Bien sûr, Black est aussi un disciple du « dieu du rock », son groupe folk-rock Tenacious D ayant sorti un album, son interprétation fiévreuse dans High Fidelity ayant volé le film. Et c’est Black, plus encore que Linklater, qui branche School sur le secteur. Dans le rôle de Dewey Finn, un loser qui refuse de se contenter d’un emploi de neuf à cinq (« Je sers la société en faisant du rock ! »), il se fait passer pour un enseignant suppléant afin de payer le loyer. Dans un premier temps, Dewey se contente de faire la grasse matinée et de dire à ses élèves, qui gagnent 15 000 dollars par an, de prendre une longue récréation. Puis il a une idée derrière la tête : il va leur enseigner le rock, les former jusqu’à ce qu’ils soient prêts à le soutenir lors du concours Battle Of The Bands qui aura lieu dans six semaines !

Black assigne à chaque enfant un instrument ou une fonction (manager, roadie, groupie…) et distribue des CD en guise de devoirs. Il se livre à des diatribes inspirées contre The Man. Il retrace les influences et l’héritage des groupes à l’aide d’organigrammes. Et il montre à Zack (Joey Gaydos), le guitariste principal, comment adopter une « position de pouvoir ». En bref, Dewey enseigne toute l’histoire du rock’n’roll en six petites semaines, tenant ainsi sa promesse que ses cours « mettront à l’épreuve votre esprit et votre tête… Et votre cerveau aussi ». Et votre cerveau aussi ». Pendant ce temps, l’orchestre s’entraîne en insonorisant la salle de classe et en mettant en place un système de sécurité élaboré pour surveiller la directrice de l’école (Joan Cusack, qui s’éloigne admirablement d’un stéréotype), qui est très prétentieuse.

Rempli de références éclairées et imprégné du même esprit de rébellion que les films pour adolescents des années 50 qui samplent le rock, comme Blackboard Jungle et High School Confidential, le film de Linklater amènera les parents – et même les grands-parents – à prendre place à côté de la brigade des boutons, des t-shirts des Who entrecoupés de ceux des White Stripes. Après tout, il s’agit d’un film qui prêche la dissidence – mais une dissidence sûre, pittoresque et gentiment anachronique, une forme de défi qui est aujourd’hui plus amusante qu’inquiétante. Linklater et le scénariste/acteur Mike White (Chuck&Buck, The Good Girl) en sont conscients, se moquant du côté sadique de Dewey tout en le saluant. Et Black le sait aussi, plongeant dans le mosh pit pour retomber sur son phizzog lorsque les spectateurs se mettent de côté.

Les messages du film sont également anciens, traditionnels et sans intérêt : les enfants coincés et la directrice amidonnée découvrent que la vie peut être plus amusante si l’on laisse tomber ses cheveux (ou si on les met en épis) ; les parents stricts apprennent qu’ils devraient renoncer à la discipline et faire confiance à leurs enfants ; et Dewey découvre qu’il peut ouvrir son cœur aux autres sans se plier à l’homme.

Ce serait ennuyeux si ce n’était pas aussi amusant. Centré sur une performance tourbillonnante de Black, qui atteint le niveau d’énergie de John Belushi, School a pour but de faire une chose et une seule. Faire. Faire. Vous. Rire. Et vous savez quoi ? Il n’y a rien de mal à cela. Il suffit de demander au public à la sortie. Vous pouvez parier votre Fender Strat qu’ils ne vous diront pas que Linklater a sacrifié sa signature visuelle…

Dead Poets Society avec des guitares. Dangerous Minds en Spandex. Jack Black dans une comédie dérivée mais très amusante.

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